Nombre de personnes vivant avec le VIH continuent de subir discrimination et brimades sur leurs lieux de service.
Ils sont enseignants, journalistes, camionneurs, mécaniciens, membres des forces de l’ordre ou du corps médical… Des travailleurs comme vous et moi. Mais chaque matin, nombre d’entre eux vont au boulot la boule au ventre. Pourquoi ? A cause de la peur. Peur d’être traités différemment, d’être jugés, peur aussi des regards, des chuchotements dans leur dos, de la mise à l’écart. Ces victimes d’idées préconçues, ce sont les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Certains diraient qu’en 2016, il est arriéré de penser à une éventuelle contamination à la simple poignée de main échangée avec un séropositif. Ils auraient tort. Car sur leurs lieux de service, parfois au sein des familles, ces hommes et ces femmes essuient les remarques désobligeantes de leurs collègues et de leurs supérieurs hiérarchiques.
Commérages, injures, harcèlement, violences. Des histoires de stigmatisation comme celles-là se racontent tous les deuxièmes dimanches du mois, au siège de l’association Espoir et vie Cameroun (Evicam), située au lieu-dit Montée Kondengui à Yaoundé. Nombre de malades gardent leur statut sérologique pour eux. D’autres se confessent à leur patron ou à leurs collaborateurs, pour justifier leurs absences dues à une fatigue extrême suite aux traitements lourds. Cette franchise, il la paie souvent comptant. C’est le cas de ce jeune instituteur qui s’est confessé auprès de son patron sur sa maladie. De bouche à oreille, la nouvelle s’est répandue à toute l’école, des enseignants aux élèves. Il a dû quitter l’établissement, tant la situation est devenue invivable. Que dire de cette femme employée dans une société, qui un jour, a eu le malheur de se confier à son chef ? Les rapports n’ont plus été les mêmes. Francis Nganhale, coordinatrice de Evicam a plusieurs fois vécu des témoignages poignants. Elle reconnait que, « d’après le constat général, si dans les autres sous régions les mentalités ont bien évolué en termes de sida, en Afrique centrale et de l’Ouest pourtant, elles ont beaucoup de mal à changer. »
Des cas comme ceux des membres d’Evicam sont non isolés. En attestent les statistiques d’une étude menée en 2012 par le Réseau camerounais des personnes vivant avec le VIH/sida (Recap+) et Global Network of People Living with HIV (GNP). Le volet de l’enquête portant sur la discrimination au travail a été réalisé auprès de 115 personnes vivant avec le VIH. Elle révèle que plus d’une personne approchée sur cinq déclarent avoir au moins une fois perdu un emploi ou une source de revenus au cours des 12 derniers mois précédant l’enquête. Près de la moitié, à cause de leur statut de séropositif. Ceux à qui on a refusé une promotion du fait de leur statut sérologique représentent 10% des personnes sollicitées pour l’enquête. Il n’y a pas qu’au travail que les séropositifs sont mis en quarantaine une fois leur statut dévoilé. La famille, censée être leur premier rempart, s’avère souvent un lieu de haute persécution.