Ce qui se passe avec le fichier électoral camerounais fait penser au nom d’une célèbre émission de télévision française diffusée jusqu’en 2007 sur France 2 : « On a tout essayé ». Le répertoire électoral affiche actuellement sept millions d’électeurs. En attendant son toilettage par Elecam, l’organisme chargé de l’organisation, de la gestion et de la supervision de l’ensemble du processus électoral et référendaire. Un chiffre qui ne reflète pas la réalité de la population électorale potentielle du pays estimée à environ 12 millions d’électeurs.
Pourtant le frémissement et l’effervescence observés pendant et après ce scrutin avaient laissé croire à un réveil électoral. L’entrée en scène de nouvelles figures dans le landernau politique était de nature à recréer une sorte de nouvel engouement chez les électeurs. L’euphorie de la campagne électorale et surtout le déroulement en mondovision du contentieux post-électoral ont rehaussé le degré de vitalité de la démocratie camerounaise. Mais un an après, rien n’a presque bougé en termes de nombre d’électeurs. Même la fameuse « Opération 11 millions électeurs » lancée par le mouvement éponyme n’a pu briser le signe indien.
Pourtant Elecam et les pouvoirs publics ont tenté par le passé d’inverser la tendance. Le chef de l’Etat avait décidé en 2011 de la gratuité des frais d’établissement de la carte nationale d’identité et des actes de naissance de naissance. Elecam est sortie de ses bureaux pour aller à la rencontre des électeurs dans les marchés, églises et dans certains événements de grande envergure. A l’observation, depuis près de dix ans, le fichier électoral est quasi-immuable. Il y a donc lieu de questionner cette léthargie afin de trouver les stratégies pour vaincre cette désaffection électorale.
Elecam devra peut-être revoir et doper sa stratégie de communication pour pousser les électeurs potentiels à s’inscrire. Une communication agressive avec une approche plus chatoyante pourrait inverser la tendance. Peut-être serait-il indiqué de cibler ou de se rapprocher davantage des potentiels électeurs dans leurs lieux d’habitation ou de service pour briser leur apathie.
Le gouvernement de son côté devrait se saisir du débat sur la capacité électorale. Il est peut-être temps d’ouvrir un débat franc sur la possibilité de révision de l’âge électoral pour le passer de 20 ans actuellement à 18 ans. Beaucoup d’observateurs relèvent l’aberration entre la capacité pénale/civile et la capacité électorale. On se demande par exemple comment un jeune de 18 ans, habilité à servir dans les forces armées et police peut être inapte à exercer son droit de vote.
Les partis politiques ne sont pas en reste. La loi stipule qu’aux côtés d’Elecam, les acteurs politiques doivent participer au processus électoral qui commence depuis l’inscription sur les listes électorales. Malheureusement, trop peu acceptent d’aller au charbon. D’autres évoquent des problèmes d’ordre financier et matériel pour se déployer sur le terrain. Les pouvoirs publics, avec l’expertise d’Elecam, devraient examiner cette prétention qui revient de manière lancinante.
Enfin, n’oublions pas que la désaffection électorale se nourrit de la vacuité des discours politiques. Les hommes politiques sont appelés à donner du contenu et du tonus à leurs programmes politiques pour intéresser les électeurs. Malheureusement, la scène politique est inondée des politiciens du dimanche qui ne s’activent qu’à la veille d’une échéance électorale.