Les travaux du Comité de suivi des résolutions de la 10e Commission mixte Tunisie-Cameroun se sont tenus les 28 et 29 juin derniers à Yaoundé. Pendant ce temps, les opérateurs économiques des deux pays échangeaient à l’hôtel Mont-Fébé sur l’approfondissement de leurs échanges commerciaux dans le cadre d’un forum économique. Deux événements majeurs qui laissent penser que le ciel entre Yaoundé et Tunis est sans nuages et que la relation bilatérale entre le Cameroun et la Tunisie est pleine de promesses. Au terme de son séjour en terre camerounaise, Khemaies Jhinaoui, ministre tunisien des Affaires étrangères, qui conduisait la délégation, dresse le bilan de sa mission au Cameroun, jette un regard sur l’avenir de cette coopération et évoque la lutte contre le terrorisme qui constitue un autre champ de bataille commun où les deux Etats entendent davantage mutualiser leurs efforts.
Khemaies Jhinaoui: «Nous devons augmenter nos échanges»
Ministre tunisien des Affaires étrangères
Monsieur le ministre, quel bilan faites-vous de votre séjour au Cameroun ?
C’est ma première visite en Afrique sub-saharienne depuis ma nomination au poste de ministre des Affaires étrangères il y a presque deux ans. Je suis très content d’avoir entamé cette visite dans cette partie du continent par le Cameroun parce que ce pays a des relations traditionnelles et historiques avec la Tunisie. Depuis presque soixante ans nous avons développé une amitié profonde et nous nous sommes mutuellement soutenus au sein des instances internationales et nous avons également développé une grande coopération. Plusieurs cadres camerounais ont fait leurs études dans les universités tunisiennes. Aujourd’hui, nous avons presque 2 000 étudiants camerounais qui fréquentent nos universités. J’ai justement eu des échanges intenses avec plusieurs officiels camerounais. A savoir : le Premier ministre, chef du gouvernement, Philemon Yang, qui m’a reçu au nom du chef de l’Etat, Paul Biya, le président du Sénat, Marcel Niat Njifendi, le président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguié Djibril, et plusieurs autres membres du gouvernement. Au cours de ces différents échanges, nous avons discuté de l’état de notre coopération bilatérale à ce jour, mais également des perspectives de son développement pour l’avenir. On a identifié, dans le cadre des travaux du Comité de suivi et en mars 2016 à Tunis lors de la réunion de la commission mixte, plusieurs secteurs prioritaires. Au niveau de l’enseignement et de la coopération scientifique, nous voulons augmenter le nombre d’étudiants. J’en profite d’ailleurs pour réaffirmer la disponibilité de la Tunisie à accueillir plus d’étudiants camerounais. On leur offre des bourses dans des disciplines aussi variées que la médecine dentaire, le management, le droit et l’économie. Bref, toutes les disciplines sont disponibles pour nos frères Camerounais. La Tunisie a augmenté le nombre de bourses octroyées aux étudiants camerounais.
Nous avons aussi identifié la santé, étant donné que quelque 500 Camerounais visitent chaque année la Tunisie pour des traitements médicaux. Nous disposons d’infrastructures très développées à ce sujet. Nous pensons donc que nos frères Camerounais pourront bénéficier de ces infrastructures en venant se faire soigner en Tunisie. Nous ambitionnons également de mettre en place ici au Cameroun une infrastructure en matière de santé pour permettre à nos frères Camerounais d’initier une coopération en la matière. Il y a le domaine des technologies de l’information et de la communication. Nous comptons mettre notre expertise à la disposition des Camerounais pour une coopération gagnant-gagnant.
Les échanges entre les deux pays se situent à un peu plus de 10 milliards de F. Côté tunisien, comment entendez-vous booster cette coopération au lendemain du forum économique Cameroun-Tunisie qui vient de se tenir à Yaoundé ?
Je constate que ce volume des échanges est appréciable, mais insuffisant. Nos échanges ont connu un véritable bond au cours des trois dernières années. Je pense qu’il y a toujours un potentiel énorme dans plusieurs secteurs pour davantage développer nos échanges. Parce que 25 millions de dollars comparés aux énormes potentialités des deux pays est un chiffre qui reste en deçà des aspirations des deux pays. Le Cameroun produit plusieurs produits qui pourraient être exportés sur le marché tunisien. La Tunisie a une industrie assez diversifiée et produit plusieurs produits de consommation qui pourraient être écoulés sur le marché camerounais, à l’instar du textile. Il y a aussi les secteurs de l’électricité et de la mécanique. Nous espérons qu’avec l’ouverture d’une ligne directe Tunis-Douala, Tunis-Yaoundé et la finalisation de l’étude en cours d’une ligne maritime liant Douala à Tunis, nous pourront augmenter substantiellement le volume des échanges entre nos deux pays.
Le Cameroun et la Tunisie ont en commun la lutte contre le terrorisme. Comment entendez-vous davantage mutualiser vos efforts pour venir à bout de cet ennemi commun?
Il s’agit-là d’un fléau qui n’a pas de religion et de territoire et qui frappe de manière indiscriminée tous les pays du monde. La lutte contre ce fléau requiert une coopération étroite entre diverses nations. Entre la Tunisie et le Cameroun, il y a déjà un début de coopération. Le ministre camerounais de la Défense, Joseph Beti Assomo, a visité la Tunisie l’année dernière. Je pense que nous devons davantage travailler ensemble en favorisant les échanges d’informations entre les services compétents des deux pays, en améliorant la formation des forces intérieures de lutte contre le terrorisme au Cameroun et en Tunisie en s’entraidant pour faire face au terrorisme. Au Cameroun ce fléau s’appelle Boko Haram et en Tunisie il porte le nom de Daesh ou al-Qaïda. Toutes ces organisations appartiennent à la même école : l’école de la haine.