Deux sous-officiers de gendarmerie de Douala en flagrant délit de rançonnement dans une vidéo ont été mutés. Ils seront traduits au conseil de discipline et jugés au Tribunal militaire
Tout est parti d’une vidéo de trois minutes et 26 secondes publiée sur les réseaux sociaux au début du mois de mai. Dans ce tournage de fortune, des gendarmes du Peloton routier motorisé de Bonabéri à Douala, l’un sur une moto, sifflet à la bouche et casque sur la tête, sont en pleine opération de rançonnement d’usagers de la route. C’est ce que le ministre délégué à la présidence chargé de la Défense, Joseph Beti Assomo, qualifie « d’actes de corruption à ciel ouvert », après les conclusions d’une enquête administrative ouverte par les services compétents du MINDEF. Cette vidéo avait alors suscité une vague de réactions, des messages véhéments dénonçant cet acte et appelant à des sanctions lourdes de la part du haut commandement.
Quelques semaines après que le MINDEF se soit saisit de ce dossier, Joseph Beti Assomo a rendu public lundi un communiqué pour indiquer les mesures prises par le haut commandant. « Les intéressés, écrit le MINDEF, ont été déchargés de leurs fonctions respectives et mutés dans l’intérêt du service ». En effet, l’adjudant Achille Etouke et le maréchal des logis chef Guy Arouptouang ont été affectés dans la légion du Logone-et-Chari dans le Nord. Le communiqué indique, en outre, qu’ils seront traduits devant le conseil de discipline. « Une enquête judiciaire a par ailleurs été ouverte en vue de leur poursuite devant le Tribunal militaire », précise-t-il.
Le haut commandement a donc sévi, face à un écart de comportement avéré. Une décision qui se situe, rappelle le MINDEF dans son communiqué, dans le respect des instructions du chef de l’Etat, chef des armées. Ce dernier « qui veille particulièrement sur le comportement exemplaire des éléments des forces de défense ».Ainsi, des instructions ont été données aux chefs militaires pour des sanctions à prendre à l’encontre de tous les auteurs d’actes contraires au règlement de discipline générale dans les forces de défense.
La parole aux acteurs
Didier Nyoumi: « Nul n’est au-dessus de la loi »
Acteur de la société civile
« Je pars du principe que nul n’est au-dessus de la loi, les lois qui régissent le fonctionnement d’une société. Et partant du fait que certaines personnes sont garantes du respect de cette loi, il est donc normal que s’il y a entrave, qu’elles soient sévèrement punies pour servir d’exemple. Dans un premier temps, parce que cette catégorie d’individu a enfreint la loi et dans un second, parce qu’il ne l’a pas protégée. Quand une personne arbore le symbole de la République, elle doit tout faire pour être irréprochable.»
Cosmas Nwatchok: « C’est normal que les écarts soient sanctionnés »
Employé dans une structure de la place
« A titre personnel, je pense que notre pays dans sa quête de bâtir une nation solidaire et unie doit s’appuyer sur les principes tels que la légalité, la justice, la loyauté. Et il est important que chaque citoyen, au-delà de son rang, sa classe sociale, son origine ou son genre, jouisse des mêmes prérogatives, soit astreint au respect des mêmes lois et ce n’est que comme cela que le couple armée et nation pourra œuvrer efficacement à l’atteinte de l’émergence. Donc ce n’est que normal que les écarts de comportement soient sanctionnés, personne n’est au-dessus de la loi ».
Judith Mibog: « Ça rassure la population »
Habitante de Douala
« Le fait de savoir qu’un homme en tenue peut être sanctionné rassure la population. Les gens n’osent parfois pas leur porter plainte, parce qu’ils se disent que ça ne sert à rien. Les forces de l’ordre font le serment de veiller sur nous les civils, mais on y retrouve des brebis galeuses qui n’agissent que pour leur intérêt et salissent la réputation globale de l’armée. Et la population a parfois une mauvaise image de ses hommes en tenue. On pense que tous ne pensent qu’à se remplir les poches, qu’à leur propre intérêt. Ce qui est faux. Il y en a beaucoup qui sont des hommes intègres.»